POURQUOI JE M'EN MÊLE ...

"NOUS SOMMES TOUS SOURDS QUAND CELA ARRANGE NOTRE BONHEUR. CELA REPOSE UN PEU DE NE PAS TOUT ENTENDRE" - Tahar Ben Jelloun

samedi 4 décembre 2010

Haro sur ces voleurs d'élections qui n'ont pas peur du scandale !


Ils sont la honte de l’Afrique. Ils sont ceux qui donnent raison aux afropessimistes qui continuent à voir dans les Africains des incapables juste bons à vivre aux crochets des nations dites riches. A cause d’eux, ceux qui prétendent que « la démocratie est un luxe pour les Africains » ont difficile à trouver contradicteurs. A cause d’eux, l’Afrique reste à la traîne quand le reste du monde, à l’image des pays émergents, prend le chemin du développement et réussit tant bien que mal à donner à l’homme, au citoyen, sa dignité intrinsèque. Ils bafouent les droits les plus fondamentaux de leurs concitoyens et sont prêts à mettre beaucoup de sang dans le vin de leur folie du pouvoir. Pour tout dire, ils sont « le VIH politique » d’une Afrique à qui ils refusent ce qui a toujours été à l’origine des progrès de toutes les civilisations depuis la nuit des temps : le rêve.

Un des premiers à inaugurer la série fut un certain Robert Mugabe. Naguère intrépide combattant contre le régime ségrégationniste de l’ex-Rhodésie du Sud sous les couleurs d’une ZANU-PF saluée par l’ensemble de l’Afrique libre, Mugabe a fini en dictateur sanguinaire, affameur de son peuple. Pire, il a volé à ce même peuple qu’il prétend toujours défendre contre « l’impérialisme occidental », le droit de se choisir ses dirigeants, autrement dit de s’inventer un autre avenir. Battu aux élections par l’opposant et ancien syndicaliste Morgan Tsvangirai dont il fut longtemps le bourreau, l’homme s’est imposé envers et contre tout - avec des milliers de morts au passage - s’accrochant au pouvoir dans un pays exsangue. Depuis, les Zimbabwéens n’ont pas fini de payer la folie de leur ancien « libérateur ».

Puis, le modèle a été repris par un certain Mwai Kibaki, dictateur-président du pays où vit la famille paternelle de l’actuel occupant de la Maison Blanche, j’ai cité le Kenya. Battu à l’élection présidentielle du 27 décembre 2007 par l’opposant Raila Odinga, Kibaki s’impose, s’accroche au pouvoir et tant pis si cela coûte la vie à des milliers de Kenyans dont le seul tort aura été d’exprimer leur choix par les urnes. Vaincre à tout prix.

Dans les deux cas précités et dans d’autres, au nom de la recherche d’une paix contre laquelle personne ne peut se prononcer, les vaincus ont revêtu les habits de vainqueurs, tandis que les vrais vainqueurs ont été contraints à l’humiliation. Les « négociations politiques », euphémisme pour désigner pudiquement les farces postélectorales dont l’Afrique est en voie de devenir championne du monde, ont accouché des situations que l’on pourrait qualifier d’ubuesques si elles n’étaient pas dramatiques pour les peuples. Au nom de l’unité nationale, le président vaincu est resté en poste, l’opposant élu se contentant du strapontin de Premier ministre. Ainsi va la démocratie africaine où tout le monde en appelle à la volonté du peuple, mais où très peu de Chefs d’État respectent les résultats des urnes, lorsqu’ils n’ont pas choisi de tripatouiller les dispositions constitutionnelles pour devenir des présidents à vie.

Arrive Laurent Gbagbo, celui que l’on surnomme en Côte d’Ivoire « le Boulanger d’Abidjan », en raison de sa capacité maintes fois prouvée de rouler dans la farine alliés et adversaires politiques. Après une élection plus que confuse en 2000 face à l’ancien putshiste Robert Guei, l’homme a déçu tous ceux qui avaient vu en ce vieil opposant socialiste celui qui ramènerait les Ivoiriens sur le chemin de la concorde, de l’unité et du redressement économique. Reniant toutes ses promesses, il surfera comme ses deux prédécesseurs sur la vague xénophobe et populiste, ostracisant politiquement son rival l’ancien Premier ministre Alassane Drame Ouattara qu’il empêchera constitutionnellement de se présenter à la présidentielle suivante. Tant et si bien qu’une rébellion prendra racine dans le nord du pays, lui permettant par un malheureux paradoxe d’usurper un mandat entier, entre 2005 et 2010. Contraint à la négociation, Gbagbo n’aura d’autre choix que de faire sauter le verrou constitutionnel qui rendait inéligible l’ancien Premier ministre et ancien Directeur général adjoint du FMI, première étape vers ce qui allait s’avérer être son propre tombeau politique le soir du 18 novembre 2010. En effet, à l’issue du deuxième tour d’une présidentielle jugée démocratique par l’ensemble des observateurs, le Président sortant est battu à plate couture par son rival. Mais Gbabgo est un autre Mugabe qui aura réussi l’impensable : voler une victoire aussi nette qu’incontestable (54,1% contre 45,9%) de Ouattara, faire obstruction à la publication officielle des résultats provisoires par l’organe indépendant habilité à le faire, puis instrumentaliser une Cour constitutionnelle composée de ses « créatures » pour s’autodésigner vainqueur avec 51,4% de suffrages. Ni l’ONU, garante du processus électoral, ni ses pairs Africains de la CEDEAO, ni l’Union Européenne ni même le Premier ministre sortant qui fut son premier collaborateur ne reconnaissent sa pseudo-victoire, mais il n’en a cure. Ce samedi 4 décembre, une cérémonie digne d’un roman d’Ahmadou Kourouma vient de l’investir Président pour 5 années supplémentaires. Les forces armées et de sécurité (voir la vidéo ci-dessous) viennent de lui faire allégeance, acte superfétatoire s’il en est, car ces godillots en uniforme ne sont rien de moins qu’une petite bande de lâches qui des années durant l’ont aidé à assassiner et à neutraliser toute velléité de résistance à son pouvoir partisan.

Ce samedi, tous ceux qui aiment l’Afrique et croient encore en elle, ont mal. C’est l’imposture de trop. La farce de Laurent Gbagbo, si elle ne trouve pas en face d’elle une réponse énergique et sans équivoque des Ivoiriens d’abord et de la communauté internationale ensuite, fera passer à tous les dictateurs africains un message tout simple : « Volez les élections, trichez sans état d’âme, il en restera toujours quelque chose ! ».


Ci-dessous, le message de la hiérarchie militaire ivoirienne :

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